Adaptation des habitats rocheux périglaciaires alpins dans un contexte de changement climatique.
Projet financé avec le concours de l’Union européenne. l’Europe s’engage sur le Massif des Alpes avec le Fonds Européen de Développement Régional
Contexte du projet
Les effets du changement climatique s’expriment de manière particulièrement marquée dans les territoires de montagne. Ainsi, la hausse des températures moyennes sur le siècle dernier est de l’ordre d’1°C en Europe, contre 2°C sur le massif alpin (Agence Européenne de l’Environnement, 2009). Le recul des glaciers offre une illustration marquante de ce réchauffement rapide. Depuis la fin du Petit Age Glaciaire (1350-1850), un retrait généralisé des surfaces glaciaires est observé. De récentes études portant sur l’état et l’évolution des glaciers alpins prévoient la fonte de 63 à 95% du volume glaciaire alpin actuel d’ici 2100, en fonction des différents scénarios d’émissions de gaz à effet de serre (Zekollari et al., 2019).
Les évolutions climatiques permettent de prévoir l’augmentation de la durée de la période de végétation avec pour conséquence la remontée altitudinale de la limite forestière ainsi que de l’ensemble des étages de végétation. Ces changements vont avoir des conséquences directes sur la phénologie des espèces (par exemple la date de floraison) ainsi que sur leur aire de répartition favorable, tant pour la faune que la flore.
Des remontées altitudinales d’espèces sont constatées et devraient s’amplifier : les espèces natives présentes actuellement à des altitudes plus basses vont progressivement se déplacer vers les sommets. Ainsi, on assiste depuis quelques années à des transformations rapides, et notamment à l’augmentation de la richesse spécifique floristique dans les montagnes européennes (Lamprecht et al., 2018 ; Steinbauer et al., 2018 ), accompagnée du verdissement des étages alpins dans les Alpes en lien avec l’augmentation de la période de végétation (Carlson et al., 2017 ).
Les changements climatiques actuels modifient donc grandement le fonctionnement des habitats en montagne et notamment les habitats liés au pergélisol, aux névés et aux glaciers qui connaissent une fonte accélérée (Rapport EFESE, 2018 ). La végétation de ces milieux va certainement changer mais on ne connaît pas sa trajectoire. Il convient alors de suivre les espèces « caractéristiques » de ces milieux pour comprendre et anticiper les évolutions du paysage.
Objectifs et actions du projet
Le projet ROCVEG a pour objectif global de mieux connaître 3 habitats d’intérêt communautaire, caractéristiques et emblématiques du massif alpin, en lien fort avec le froid et parfois soumis aux conditions de pergélisol. Les habitats concernés par le projet sont :
- les peuplements de Pins à crochets et d’Epicéas nains sur éboulis gelés, appelés aussi éboulis froid (code Corine 42.4223/9430*), habitat prioritaire,
- les glaciers rocheux (code Corine 63.3/8340),
- les végétations herbacées pionnières des alluvions torrentielles subalpines et alpines à Epilobe de Fleischer des marges proglaciaires (code Corine 24.22/3220).
Par ailleurs, ces habitats présentent des espèces menacées alpines d’intérêt communautaire inscrites à l’annexe 2 :
- Lycopode sabine (Huperzia selago)
- Lycopode à rameaux annuels (Lycopodium annotinum)
- Trèfle des rochers (Trifolium saxatile)
- Buxbaumie verte (Buxbaumia viridis)
- Sphaignes (Sphagnum sp.)
- lichens du genre Cladonia (Cladonia arbuscula subsp. arbuscula, C. arbuscula subsp. mitis, C. rangiferina)
Le projet ROCVEG vise à suivre l’évolution de ces 3 habitats rocheux dans le contexte des changements climatiques actuels grâce à une approche pluridisciplinaire associant botanique, écologie, climatologie et télédétection.
Production et gestion des connaissances sont les priorités du projet, grâce à :
- des inventaires naturalistes
- des suivis d’espèces végétales et d’habitats naturels
- la création d’outils de suivi et d’observation visant la production de données
- la mise à disposition de ces données dans les SINP
- la mise à jour des fiches des cahiers habitats N2000 correspondantes
Volet 1 : éboulis froids
Il s’agit d’éboulis caractérisés par des circulations d’air en profondeur entre les blocs, maintenant des températures froides en été, à l’origine d’une végétation boréoalpine à arbres nains. Ils sont aussi appelés « écosystèmes forestiers abyssaux ».
L’objectif est de suivre l’évolution de la végétation de 10 éboulis froids grâce au suivi initial réalisé en 2016 et 2017 dans le cadre du programme RESEAUFLORE
Les actions prévues sont les suivantes :
- Suivi à t+3 ans pour apprécier d’éventuels changements en lien avec les suivis thermiques
- Suivi fin des liens végétation/température du sol sur 1 site : Pellafol (38)
- Description morphologique des éboulis étudiés (topographie, pente, granulométrie, géologie, système amont/aval)
- Actualisation de la fiche « Éboulis froids » des cahiers Habitats N2000
Volet 2 : Glaciers rocheux
Il s’agit d’une masse de débris rocheux mélangés à de la glace se déplaçant à très faible vitesse (quelques cm à quelques m par an) sur un versant.
L’objectif est de mieux connaître la végétation des glaciers rocheux, milieux encore peu étudiés.
Les actions prévues sont les suivantes :
- Définition du protocole d’inventaires et de suivi
- Inventaires de terrain sur 6 sites (3 en Auvergne-Rhône-Alpes : Les Deux Alpes, Val Cenis, Thabor, et 3 en Provence-Alpes-Côte-d’Azur : Névache, Rochebrune et Laurichard)
- Suivi de 4 sites tests (2 en Auvergne-Rhône-Alpes et 2 en Provence-Alpes-Côte-d’Azur)
- Rédaction d’un Guide des espèces caractéristiques des glaciers rocheux des Alpes
- Actualisation de la fiche «Glaciers rocheux» des cahiers Habitats N2000
Volet 3 : Marges proglaciaires
Il s’agit de la zone apparue lors du retrait glaciaire, depuis la fin du Petit Age glaciaire (vers 1850). Ces nouveaux milieux libérés par les glaciers sont ensuite progressivement colonisés par la végétation.
L’objectif est de mieux connaître la végétation des marges proglaciaires, de suivre des changements de végétation le long des chronoséquences et de comprendre les dynamiques de colonisation grâce à deux méthodes complémentaires :
- le suivi de végétation par des méthodes phyto-écologiques
- le suivi de végétation par imagerie aérienne à très haute résolution spatiale et spectrale (drones, images satellitaires)
Les actions prévues sont les suivantes :
- Définition du protocole qualitatif et quantitatif de suivi de la dynamique végétale
- Inventaires phyto-écologiques sur 2 sites (Glacier de Gébroulaz en Vanoise et Glacier de Saint-Sorlin dans le Massif des Grandes Rousses) et participation aux inventaires sur 3 sites du Massif du Mont-Blanc (Pélerins, Tour et Orny)
- Exploitation des images aériennes satellitaires disponibles et/ou prise d’images aériennes par drones
- Actualisation de la fiche «Végétations herbacées des alluvions torrentielles subalpines et alpines à Epilobe de Fleischer» des cahiers Habitats N2000
Lien avec le projet CLIMB+ (FEDER POIA) mené par le CREA Mont-Blanc : creamontblanc.org/fr/climb
Lien avec le projet CClimaTT (Interreg ALCOTRA) mené par le Parc National des Ecrins : www.ecrins-parcnational.fr/cclimatt-changements-climatiques-territoire-transfrontalier
Partenaires techniques, contributeurs et associés
Financement
Le projet ROCVEG est cofinancé par l’Union européenne et le Fonds national d’aménagement et de développement des territoires dans le cadre du Programme opérationnel interrégional du Massif des Alpes.
Fond Européen de Développement Régional :
- 2019-2021 : 66 590 €
- 2022 : 19 844 €
Fonds national d’aménagement et de développement du territoire :
- 2019-2021 : 39 953 €
- 2022 : 11 906 €
Pour nous contacter
Sophie Vallée, service Conservation